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Le blog de Tony Andreani
25 septembre 2021

AVANT PROPOS

Au lecteur

 Voici le début du manuscrit dont j'avais annoncé la rédaction...il y dix ans : Les concepts fondamentaux du matérialisme historique revisités. Il s'agit maintenant d'un livre qui doit paraitre prochainement, et qui résume un très long travail de recherche.   Aux lecteurs qu'il pourra intéresser, je propose ici l'Avant propos, qui en situe le cadre.

Dans un prochain message, je publiera également un long texte, intitulé Une vue d'ensemble, qui en donne les lignes directrices (et qui pourra être lu séparément), ainsi que la table des matières de l'ouvrage. Si le lecteur veut en savoir plus sur tel ou tel chapitre, je lui propose de prendre contact avec moi, et je me ferai un plaisir de le lui communiquer et serai très heureux d'avoir ses observations. Bien cordialement

Tony Andréani

 

AVANT PROPOS

 

 

Pourquoi revisiter les concepts fondamentaux du matérialisme historique ? D’abord, tout simplement parce que c’est là une nécessité, comme il en va pour toutes les autres sciences, si elles veulent progresser. Or le matérialisme historique n’est rien d’autre qu’une entreprise scientifique, le projet d’une théorie rationnelle de l’histoire. C’est du moins comme cela que Marx et Engels l’envisageaient, et c’est dans cette perspective que je me suis inscrit, perspective à distinguer de celle d’une philosophie marxiste, qui a joué et doit jouer son rôle (j’y reviendrai), mais dont il faut le dissocier pour éviter des confusions. La deuxième raison est que l’œuvre scientifique de Marx n’était qu’un chantier, auquel j’avais essayé d’apporter quelques pierres, il y a une trentaine d’années dans deux volumes qui s’intitulaient De la société à l’histoire[1], ouvrages aujourd’hui introuvables, et qui épuiseraient la patience d’un lecteur. Je me suis donc proposé d’en donner ici une version très simplifiée - renvoyant le lecteur qui voudrait en savoir plus au texte original. Tout ceci dans l’idée qu’elle peut encore servir aujourd’hui. Mais j’en ai aussi retravaillé quelques aspects dans des écrits ultérieurs, que je voudrais également consigner ici, de manière à nouveau très résumée.

Je vais donc commencer par dire en quoi l’œuvre scientifique de Marx était et demeure un immense chantier.

C’est un chantier au sens où elle fut, dans l’idée et de l’aveu de son auteur lui-même, toujours en construction. On sait qu’il a mainte fois repris son ouvrage, et qu’il fut rarement satisfait de son état d’élaboration, au point qu’il a laissé une énorme masse de manuscrits inédits, et qu’il n’a publié qu’en partie, et comme à regret, sa pièce maîtresse, Le Capital (c’est Engels qui éditera, sur la base des manuscrits, les Livres 2 et 3, qui ne s’achèvent point)[2].

C’est aussi un chantier immense, parce que Marx a ambitionné de produire une théorie d’ensemble, couvrant tous les champs de ce qu’on appelle aujourd’hui les sciences humaines. A cet égard elle n’a pas d’équivalent, sauf chez les grands philosophes encyclopédistes – mais ils sont antérieurs au développement de ces sciences humaines, qui ont conquis leur autonomie en partie contre eux. Tous les grands théoriciens de ces sciences après Marx se sont cantonnés dans l’une d’elles, quitte à déborder sur les autres et à tenter des croisements. C’est cette volonté encyclopédique que fait que, aujourd’hui, Marx est inclassable : on le trouve partout, mais on n’en utilise généralement que des fragments épars. Par exemple, en économie, Marx, quand il n’est pas escamoté, figure parmi « les classiques », et on n’en retient alors que de petits bouts, généralement isolés et mal lus, alors qu’il faudrait les replacer dans la construction d’ensemble de sa théorie. Même les économistes marxistes, souvent de grand talent, sortent rarement de leur discipline.

C’est enfin un chantier, parce que Marx voulait mettre ses matériaux dans un ordre raisonné, systématique. Tous les écrits qu’il a publiés n’étaient pas seulement dans son esprit des essais lancés dans diverses directions, mais aussi des pièces qui devaient s’insérer, d’une façon ou une autre, dans un vaste corpus – dont quelques plans dressés par lui donnent l’idée. Or c’est cet esprit de système qui a été violemment attaqué par tous ceux qui voulaient, disaient-ils, en finir avec les idéologies. Situation assez étrange, car au même moment (disons à partir des années 1970) l’économie instituée tentait de liquider toutes les hétérodoxies et de conquérir, avec sa batterie de concepts, tous les autres champs des sciences humaines, pour se constituer en discipline reine. Et ses effets pratiques ont été autrement plus puissants que ceux de tous les « déconstructeurs » de systèmes[3]. Nous les subissons aujourd’hui quotidiennement.

Il n’est pas exagéré de dire que le chantier proprement théorique de Marx, s’agissant des concepts fondamentaux du « matérialisme historique », a été, en tant que tel, laissé à l’abandon par la plupart des marxistes.  La chose paraît ahurissante quand on sait que la littérature marxiste occuperait des bibliothèques entières, et alors que la numérisation de tant de volumes, d’articles et de notes et les moteurs de recherche permettent d’accéder plus facilement à l’immensité de ce continent. Certes il y a eu, à côté de légions d’exégètes, d’importants continuateurs et quelques très grands noms, à commencer par Engels qui a participé à la construction de l’œuvre et l’a poursuivie. Il y a eu, et il y a toujours, de remarquables économistes, historiens, géographes, sociologues, qui ont fait progresser la théorie marxiste, travaillant surtout sur ce que Marx avait laissé en plan ou à l’état d’ébauche et sur les évolutions contemporaines du capitalisme. Les relectures du Capital ont été nombreuses. Mais bien peu nombreux ont été ceux qui ont essayé de retravailler systématiquement l’édifice des concepts de base, d’en reprendre et d’en améliorer l’architecture, voire de la compléter[4].

Les marxistes ont eu des excuses. Une grande partie de l’œuvre leur était inaccessible, nombre d’écrits n’ayant été publiés que plusieurs décades après la mort de Marx, et la MEGA (les œuvres complètes de Marx et d’Engels, y compris les manuscrits et la correspondance, qui devraient représenter 120 volumes !) étant restée une entreprise encore inachevée à ce jour[5], seulement partiellement traduite dans les principales langues. L’urgence politique, la violence des affrontements idéologiques, la chape de plomb du marxisme stalinien, sa critique trotskyste et maoïste, l’histoire terrible du « court XX° siècle » (selon les termes de l’historien marxiste Eric Hobsbawn), les transformations du capitalisme jusqu’à sa révolution néolibérale, l’arrivée massive de nouveaux savoirs n’inclinaient pas à la patience. Il n’en reste pas moins que le dogmatisme, ou plutôt les dogmatismes (tant les héritiers se sont déchirés), ont produit des effets sclérosants, et des contre-effets tout aussi réducteurs, si bien que la tâche de continuation/reconstruction reste devant nous, en Occident, où elle est confinée dans des cercles restreints, ou dans des pays qui se réclament officiellement du marxisme, comme la Chine.

Je voudrais ajouter ici quelques mots sur mon itinéraire. J’ai découvert Marx en 1968. Je n’en connaissais que quelques textes célèbres, car, s’il était très présent dans le débat politique, il était alors banni des études universitaires. Je me souviens avoir passé un mois à lire Le Capital de la première à la dernière ligne, m’être senti emporté par une logique puissante du texte, et avoir éprouvé la grande surprise de n’y pas retrouver les lignes de lecture qui dominaient à l’époque les discussions (pour ne citer que les deux principales que je connaissais bien : celle de Lukacs et celle d’Althusser, avec la querelle sur l’humanisme et l’anti-humanisme). C’était aussi l’époque où l’on se disputait sur la nature du système soviétique et où la critique chinoise de ce régime « révisionniste » et, au-delà, du stalinisme, occupait nombre d’esprits. Je lisais notamment Charles Bettelheim et avais suivi quelques séances de son séminaire. Tout cela m’a conduit à un travail d’investigation, portant à la fois sur l’œuvre de Marx et sur sa confrontation avec les connaissances contemporaines, qui m’a occupé pendant une quinzaine d’années, et quelque peu soustrait aux batailles politiques des années 1970 et suivantes. Je me suis mis en tête le projet assez fou de revisiter les fondements du matérialisme historique, en précisant et affinant des concepts, en comblant des lacunes, en approfondissant la logique. Pour cela je décidai d’adopter « l’ordre d’exposition » que Marx avait voulu suivre, celui qui va de l’abstrait au concret, mais qu’il avait mêlé, dans Le Capital, avec deux autres préoccupations, celle d’un « ordre d’investigation » (de l’apparence à l’essence) et celle d’une présentation historique (suivre le capitalisme dans son histoire et illustrer la théorie avec des exemples). J’ai trouvé que Le Capital  contenait, pour mieux cerner la spécificité du capitalisme, de nombreux éléments pour une théorie générale de la société et de l’histoire. C’était elle qu’il convenait d’abord de mettre à jour. Car mon propos, je le souligne, n’était pas de rebâtir tout le matérialisme historique, tâche qui de toute façon eût été hors de ma portée, mais de me couler dans la théorie pour la prolonger. Et je n’ai pas varié depuis là-dessus : je me vois toujours plus comme un continuateur que comme un refondateur, à la différence de quelques uns de mes contemporains. Je suis entré dans le chantier Marx à la manière dont le préhistorien reconstitue un vieil édifice avec des outils nouveaux. Et, pendant tout ce temps, j’ai eu le sentiment, pour reprendre des termes que j’ai employés, d’être plus « un scribe qu’un auteur ». Formule un peu abusive, car il est vrai que j’ai été conduit aussi à innover véritablement. Marx m’avait semblé manquer notamment tout un pan de la réalité humaine, celui des rapports interindividuels, dans leur différence et leur opposition avec les rapports sociaux. Il n’a pas connu la révolution psychanalytique, dans sa consistance scientifique, ni bien d’autres analyses moins profondes, mais fort éclairantes. Son anthropologie, si suggestive, si militante, est restée, selon moi, assez faible, et même en deçà de certaines vues lumineuses des penseurs libéraux (Smith, Ferguson par exemple) et de Rousseau, et trop liée aux représentations économistes classiques du sujet (celui des intérêts matériels, dont Bentham, qu’il critiquait pourtant, avait fourni l’épure qui domine encore aujourd’hui le discours économique).

Le contexte des années 1980 était si hostile, en France plus que partout ailleurs, au marxisme, que j’ai eu le plus grand mal à publier le gros ouvrage, avec ses deux tomes (plus de 1300 pages), qui condensait lui-même ce qui fut une thèse de doctorat d’Etat. Il fut rapidement pilonné, en sorte qu’il est indisponible aujourd’hui, sauf en bibliothèque, en version numérique, ou d’occasion. Pressé par quelques amis d’en donner une version plus accessible et actualisée, dans une conjoncture où Marx n’était plus tabou, j’ai résisté jusqu’à maintenant, car d’autres tâches me semblaient plus urgentes et que je ne savais comment m’y prendre pour résumer un travail essentiellement théorique, au risque de le décharner encore plus en élaguant ses exemples. Et puis, finalement, je viens de  m’y suis résoudre, dans l’idée que je n’avais rien de mieux, rien de plus utile, à faire. Le livre actuel voudrait être un ouvrage de vulgarisation, avec toutes les simplifications et les facilités de ce genre d’exercice, mais je me suis souvenu que Marx n’avait pas répugné à le faire, et me suis dit que le lecteur pourrait toujours se rapporter à mon texte de base, s’il en éprouvait le besoin et le désir. En outre, entre la publication de mon livre sur Marx (1989) et le moment actuel, je crois avoir progressé sur de nombreux points, et opéré un certain nombre de rectifications.

Je terminerai ce propos préliminaire par quelques considérations sur des questions incontournables. Je suppose que même les curieux de la pensée de Marx et du marxisme – qui sont de nos jours plus nombreux que les années passées – ne peuvent manquer de se poser les questions suivantes : en quoi un auteur mort il y a bien plus d’un siècle peut-il encore aujourd’hui éclairer nos lanternes ? Quel sens y a-t-il à vouloir peaufiner et prolonger une théorie à laquelle l’histoire semble avoir apporté un certain nombre de démentis et que tant de travaux, mineurs ou majeurs, ont ignorée et bousculée ? Je voudrais leur répondre en quelques mots d’abord sur l’actualité de Marx.

Comme il fut un analyste exceptionnel du capitalisme, dont il a voulu définir, si je puis dire, le code génétique, et comme il a anticipé un grand nombre de ses développements, il n’est pas étonnant qu’il ait encore quelque chose à nous apprendre. Mais, si l’on en croit l’épistémologie des sciences « dures », celles-ci connaissent régulièrement des révolutions, des changements de paradigmes. N’en va-t-il pas forcément de même s’agissant du marxisme, si tant est qu’il ait une prétention scientifique ? Je ne le crois pas pour la raison suivante : les coupures épistémologiques dans les sciences de l’homme ne suivent que des rythmes très lents, parce qu’elles sont intimement liées à l’histoire des sociétés. Or il est clair que nous sommes toujours dans l’horizon du capitalisme, et que les dépassements tentés au siècle dernier ou bien ont échoué ou bien n’ont engagé, dans le meilleur des cas, qu’une transition dont tout laisse à penser qu’elle serait pluriséculaire. Au reste, si changement de paradigme il doit y avoir un jour, il n’invalidera pas plus la théorie marxienne que la physique einsteinienne n’a rendu fausse la physique newtonienne.

Dire cela, ce n’est pas rallier le relativisme historique cher à Gramsci, pour qui la science n’est vraie que si elle exprime au mieux le processus en cours dans une situation historique donnée. La notion de coupure épistémologique, théorisée par Gaston Bachelard, reste fondamentale, et c’est bien dans cette optique que Marx et Engels s’inscrivaient, quand ils comparaient leurs découvertes à celles des sciences de la nature de leur époque.

Ceci dit, la longue distance qui nous sépare de la fin du XIX° siècle n’a pas manqué de découvertes scientifiques. J’ai déjà évoqué la psychanalyse, mais elle ne fut pas la seule, loin de là, à renouveler notre savoir. Pour me limiter au domaine de l’économie, l’apport de Keynes fut sans aucun doute considérable, notamment en ce qui concerne la prise en compte de l’incertitude, des temps courts et des anticipations, et l’analyse des rôles de la monnaie. Mais même l’économie aujourd’hui dominante nous a fourni, chez certains de ses pères fondateurs ou de ses grands auteurs, quantité d’outils et d’analyses dont nous ne saurions nous passer. Qu’importe qu’elle se soit constituée à partir des postulats d’un modèle néo-classique fantasmagorique pour lui donner plus de réalité ou pour le contester, elle a vraiment fait progresser nos connaissances (je pense par exemple particulier aux théories néo-institutionnalistes de l’entreprise, à l’analyse des externalités de la relation marchande et des coûts de transaction, à la révolution informationnelle, avec sa thématisation des asymétries d’information, à l’apport de la théorie des jeux). Donc Marx n’a pas tout dit, et, tout cela, une fois passé au crible de la critique, est bon à prendre. Mais ma position est qu’on peut et qu’il faut intégrer toutes ces découvertes à l’édifice marxien, quitte à en modifier des parties. C’est là un travail très difficile, qui m’a été utile dans d’autres écrits[6], mais qui ne sera pas entrepris dans ce livre, car ces apports extérieurs ne concernent que la théorie du capitalisme, que je n’aborderai que succinctement dans ce livre, où je me limiterai à l’étude de ses traits fondamentaux.

On a dit et redit que Marx s’était beaucoup trompé et illusionné. Exemples. Les révolutions socialistes ne se sont pas produites là où il l’escomptait, à savoir dans les pays où le capitalisme serait le plus développé. Et elles ont donné naissance à des régimes à bien des égards à l’opposé de ses vues. Dans les pays capitalistes les plus avancés la classe ouvrière n’a pas fait la révolution, mais a passé des compromis (pendant la période dite keynésienne), avant de se voir désarticulée par le cours néolibéral. Sa pensée du communisme paraît aujourd’hui largement utopique. Sa théorie de l’histoire, avec ses accents nécessitaristes, s’en est trouvée remise en cause. Et finalement même les esprits qui ne le vouent pas aux gémonies et reconnaissent le caractère quasi prophétique d’un certain nombre de ses analyses (sur la concentration du capital, sur les crises du capitalisme, sur le marché mondial) en sont venus à contester le caractère scientifique de son œuvre.

En réalité Marx s’est beaucoup moins trompé que ne le croient des lecteurs pressés, qui se sont arrêtés aux textes les plus connus, et que je ne l’ai cru moi-même. Je reviendrai en détail sur plusieurs questions qu’il a retravaillées, pendant les dernières années de sa vie, dans une masse de manuscrits (pas moins de 30.000 pages !), qui ne furent connus que plus tard. Je me contenterai ici de les signaler.

Marx revoit d’abord la fresque historique qui avait été dressée dans Le Manifeste, ce qu’il avait du reste commencé à faire dans les Manuscrits de 1857-1858, dits Grundrisse.

Lecteur infatigable, malgré une santé déclinante, il découvre alors des sociétés « primitives », dont il ne savait pas grand-chose, à travers les écrits de Morgan et Bachofen, lesquels qui ont servi  de base au livre d’Engels, L’origine de la famille, de la propriété et de l’Etat. Il y voit des sociétés sans classes, non patriarcales, et même étonnamment démocratiques (les Iroquois). Les inégalités sociales n’ont donc pas traversé toute l’histoire. Et ses carnets ethnographiques  en sont une étude minutieuse et commentée, qui s’écarte sur plusieurs points de l’interprétation de Engels. Bien sûr ces travaux seront largement remis en cause par la préhistoire et l’anthropologie contemporaine, notamment marxiste, et il ne pouvait rien savoir à l’époque des véritables chasseurs cueilleurs nomades, les plus proches de ce qu’il pensait être un communisme primitif. Mais, d’une certaine façon, il avait vu juste.

Il se passionne en même temps pour des communautés d’un stade plus avancé, puisqu’elles reposaient essentiellement sur l’agriculture, distinguant bien celles qui sont encore fondées sur les liens du sang, autrement dit sur la parenté, de celles qui reposaient sur le voisinage, et dont Engels et lui pensaient avoir trouvé des traces anciennes dans les tribus germaniques et des formes rémanentes en Irlande et en Inde, d’après des rapports de l’époque, rapports dont il recopiera de larges extraits qu’il annotera longuement. Tout cela conduira Engels à corriger, dans une préface de 1888, la phrase inaugurale du Manifeste : « L’histoire de toute société jusqu’à nos jours est l’histoire de la lutte des classes ». Cette idée d’une propriété commune de la terre, dont pourtant Marx voyait bien qu’elle ne signifiait pas, ou fort peu, un travail en commun, nous paraît aujourd’hui peu satisfaisante, et je dirai pourquoi, mais elle pointait vers des modes de production fort éloignés de la propriété privée pleine et entière.

Marx est conduit à revoir aussi ce qui était effectivement une de ses idées force : celle selon laquelle une révolution communiste (ou du moins socialiste, bien qu’il évite le terme) n’est possible que dans les pays où le capitalisme est le plus avancé, parce qu’il apporte avec lui le développement des forces productives qui rend possible la sortie de la pauvreté. Et c’est justement son débat avec les populistes russes à propos du mir, une commune agricole qui était encore bien vivante, qui le conduit à des considérations décisives sur le cours de l’histoire et sur les chances d’une révolution dans un pays où le capitalisme ne s’est pas pleinement développé[7]. Dans le même mouvement il revoit sa conception de la colonisation, où il avait vu d’abord, malgré toutes les horreurs qui l’ont accompagnée et dont il n’omet aucun détail, un progrès, puisqu’elle entraînait un développement des forces productives sans lequel le communisme n’était pas possible. D’où son changement de pied, notamment sur la colonisation britannique en Irlande et en Inde. On peut dire que Marx anticipait ce que les marxistes appelleront plus tard le développement du sous-développement et l’échange inégal. Il avait compris alors, surtout après l’écrasement de la Commune de Paris, que le prolétariat des métropoles capitalistes ne pouvait remporter la victoire face à une bourgeoisie qui dominait les institutions et détenait la force armée, et que des révolutions ne pouvaient se produire que dans ce que Lénine appellera « les maillons faibles » et avec le soulèvement de masses paysannes bien éloignées de la situation du petit paysan français et de sa mentalité. Ce que l’histoire devait vérifier. Tout cela n’annule pourtant pas sa proposition initiale, si on la réinterprète ainsi : la révolution ne peut réussir durablement que si elle emprunte au capitalisme un certain nombre de ses « acquêts » pendant une période de transition.

Autre révision d’ampleur opérée par le « dernier Marx »[8]. La lecture acharnée d’une masse d’ouvrages de l’époque, sur la Russie (il apprend le russe à cet effet), sur l’Inde, sur les Amerindiens, la Chine, Java, l’Egypte ancienne et les anciens Empires, la Turquie, la Perse, l’Espagne maure, lui fait abandonner une conception de l’histoire par trop eurocentriste. Il en vient à penser que ses idées sur le « despotisme oriental », sur l’arriération et la stagnation de ces sociétés, idées qui restaient prisonnières des préjugés de l’époque, lesquels avaient aussi imprégné la pensée hégélienne, devaient être révisées de fond en comble. L’histoire avait suivi plusieurs voies, et l’européenne n’en était qu’une, au demeurant tardive, et devant une grande partie de son essor aux emprunts à « l’Orient ». Ce que tous les travaux contemporains devaient confirmer (j’y consacrerai un chapitre, et discuterai à ce propos de la pertinence du concept de mode de production « asiatique », ou plus exactement « étatique », que Staline a rayée de la théorie).

Ceci dit, Marx ne voulait pas, et ne pouvait être prophète, car l’histoire n’est pas écrite d’avance. Il ne pouvait pas prévoir la violence des luttes entre impérialismes, le fascisme et le nazisme, les guerres mondiales, la division du monde en deux camps et la guerre froide, le compromis keynésien en Occident, l’avènement d’un capitalisme financiarisé (même si les prémisses en existaient à son époque) etc. La tâche de penser ces bouleversements devait revenir à ses successeurs. S’il faut lui reprocher quelque chose, c’est surtout de ne pas avoir poussé plus loin la théorie du socialisme-communisme, dans son souci de ne pas « faire bouillir les marmites de l’avenir », d’avoir trop cru qu’il serait aisé à des « travailleurs associés » de gérer rationnellement, par la planification, leur mode de production, de ne pas avoir écouté certains avertissements de Bakounine. Mais il n’en a pas moins posé quelques jalons.

Au total nous devons à Marx d’avoir posé les fondements d’une théorie scientifique de l’histoire. Et, si l’on reconnaît une science, c’est à sa volonté et à sa capacité de revoir et rectifier jusqu’à ses hypothèses de base, à reconnaître tous les « faits polémiques », comme disait Bachelard, qui la contraignent à se remanier, en sorte que la coupure épistémologique doit toujours être continuée. Ce que Marx,  adepte de la maxime selon laquelle « il faut toujours douter de tout », n’a pas hésité à faire. Le fait est que, aujourd’hui, sa théorie de l’histoire n’a pas de concurrent sérieux. Cela ne veut pas dire, je l’ai dit, que, hors de la tradition marxiste, il n’y ait eu aucun apport scientifique, que tout n’ait été que fables et savoir superficiel, « exotérique », comme dit Marx. Ces apports doivent être pris en compte et intégrés pour autant qu’ils reposent sur de solides bases factuelles, tout comme bien des critiques, quand elles ne montrent pas seulement leur ignorance ou leur méconnaissance de sa pensée.

On a enfin reproché en particulier à Marx d’avoir exposé une philosophie de l’histoire, puisqu’elle se dénommait matérialisme historique. En réalité son intuition centrale est que le secret de l’histoire doit être recherché dans les conditions matérielles de la vie humaine et dans certaines facultés et particularités de l’espèce homo, ce « troisième chimpanzé », comme l’appelle ironiquement Jared Diamond[9]. A cet égard le matérialisme historique n’est pas l’apanage de Marx. Bien des auteurs qui ont emprunté cette voie sont, si je puis dire, « marxistes sans le savoir », encore qu’ils soient loin de l’avoir ignoré.

Le présent travail n’est qu’une modeste contribution à la théorie marxiste. Il concerne ses concepts fondamentaux (le double caractère du travail en général, les modes de « la force productive » du travail, les formes de la coopération, la distinction entre les travaux productifs et les travaux improductifs etc.) et, s’agissant du moins des concepts concernant le procès de production, je n’ai rien inventé, je n’ai fait la plupart du temps que suivre des indications dispersées de Marx. Mais il me fallait bien donner un aperçu de leur caractère opératoire. J’ai donc repris à nouveaux frais la théorie des modes de production que j’avais esquissée autrefois. Ces modes de production, je le précise dès maintenant, ne sont que des structures très générales, qui permettent de se repérer dans le grand fouillis de l’histoire, mais ne sauraient rendre compte de la complexité des sociétés. Et ce que j’en dirai sera très certainement insuffisant et lacunaire, mais il fallait en passer par là. La grande question qui hante la théorie marxiste est celle de l’origine des inégalités et de leur destin. Ce sera aussi mon objet de réflexion principal, avec la question de la dialectique. J’ai essayé de faire le plus court possible, parce que le lecteur d’aujourd’hui veut d’abord, et c’est légitime, savoir en quoi la théorie marxiste peut lui servir à comprendre le monde où il vit et lui fournir des armes pour le transformer. Il me faudra donc en donner quelques applications, même brèves, à la situation actuelle.

Pour les mêmes raisons d’allègement, je réduirai au minimum les références tant aux courants de pensée dominants qu’à l’histoire des débats au sein de la tradition marxiste, et je ne joindrai pas à ce livre une bibliographie générale, qui serait trop vaste pour être utile au lecteur, et qui pourrait comporter des oublis regrettables[10]. De même on ne trouvera guère ici de marxologie, si l’on entend par là l’histoire de sa pensée et l’étude détaillée et philologique des textes (travaux de recherche qui vont être considérablement relancés par la numérisation de la MEGA). Bien entendu je ne conteste pas son utilité. Je m’y étais même d’un certaine façon adonné, puisque j’ai soutenu et je continue à penser que Marx a profondément renouvelé sa problématique durant la période de gestation du Capital[11], et passé d’une première problématique, la plus vulgarisée (celle qui s’expose notamment dans Le Manifeste communiste et jusqu’à la célèbre Préface de 1859 à la Critique de l’économie politique) à une seconde problématique, bien différente, qui se fait jour dans Le Capital. Mais elle alourdirait le propos et risquerait d’ennuyer le lecteur « pressé de conclure ». C’est aussi pourquoi je limiterai au minimum les références aux textes de Marx. J’ai bien conscience que cela ne va pas sans poser de problèmes : difficile souvent de distinguer le texte de Marx de sa remise en forme par Engels, de discerner la part de Marx dans les apports de ce dernier, de comparer les manuscrits et les éditions. Mais ma tâche sera facilitée parce que je m’en tiendrai surtout aux textes dits de la maturité, et principalement à celui du Capital, le plus important pour mon propos (j’utiliserai ici l’édition française, plus accessible au lecteur français, tout en sachant qu’elle est moins riche que les éditions allemandes, mais avec cette garantie qu’elle a été avalisée par Marx pour le livre I, lequel lui attribuait aussi, dans son Avis au lecteur de 1875, « une valeur scientifique indépendante de l’original »)[12].

Enfin, quoi qu’étant philosophe de formation,  je ne ferai que très peu de références à la philosophie de Marx et aux très nombreux philosophes qui s’en sont réclamés ou inspirés. Non pas que cela n’ait point d’importance. Et ceci pour au moins deux raisons. Le propre du marxisme, par rapport aux sciences humaines qui se sont développées depuis, est qu’il assume ses positions philosophiques, d’une part parce qu’il se veut scientifique et que la science est par nature matérialiste (mais pas au sens métaphysique du terme, car elle est agnostique), d’autre part parce que la science, si elle peut traiter de l’origine des valeurs, ne peut porter de jugements de valeur, alors que le discours de Marx en est parsemé.

Il convient que je précise ici ma position. Je l’ai dit, le matérialisme historique a l’ambition d’être une science. Or cette orientation a été contestée, voire récusée, par des philosophes qui pourtant se sont plus ou moins réclamés de Marx. Je pense ici aux théoriciens de l’Ecole de Francfort, et notamment au fameux livre de Max Horkheimer et Theodor Adorno, Dialectique de la Raison, où les auteurs dénoncent, dans le mouvement des Lumières, qu’ils font remonter jusqu’à Homère, la dictature d’une « raison instrumentale » qui aurait abouti aux pires catastrophes du XX° siècle et à une destruction de la civilisation. Cette critique du mode de pensée européen et de sa logique formelle n’est pas sans intérêt, et j’y souscrirai en partie dans l’un de mes chapitres (le chapitre 18). Tout comme je remettrai en cause le présupposé d’un acteur rationnel sur lequel repose toute l’économie néoclassique. Mais ils s’en prennent en même temps à la démarche scientifique elle-même, qui, loin d’être porteuse de progrès, aurait menacé la nature extérieure et la nature en l’homme. Cela conduira à une dérive, qui s’achèvera avec Habermas, déclarant vouloir délivrer la théorie critique du « ballast du matérialisme historique » et effectivement y aboutissant. Et le courant finira par rejoindre d’une certaine façon la position des philosophes « postmodernes », pour lesquels la science n’est qu’un « régime de vérité » parmi d’autres.

A cela j’oppose que Marx et Engels avaient explicitement voulu rompre avec les savoirs préscientifiques. Mais il faut bien s’entendre : toute coupure épistémologique n’est jamais que partielle et doit toujours être continuée. On comprend que les philosophes de l’Ecole de Francfort aient été horrifiés par le dogmatisme stalinien, qui présentait sa version du matérialisme historique comme une vérité définitive et par la terreur intellectuelle qui l’a accompagné. En ce sens le « chantier Marx » n’a pas été et ne sera jamais achevé.

Quant à la deuxième objection faite souvent au matérialisme historique, celle d’inclure un système de valeurs, il ne suffit pas de rappeler qu’aucune science humaine n’y échappe, et l’économie néoclassique moins que toute autre. Il faut dire que c’est aussi souvent un faux procès. Il est exact que la science, en tant que telle, doit s’abstraire des jugements de valeur. Mais c’est valable pendant le processus de recherche, pour qu’il ne soit pas faussé par des préjugés. C’est bien pourquoi Marx critique l’économie politique de son temps : elle préjuge, à des degrés divers, la supériorité du capitalisme et de l’économie de marché. Mais, après coup, rien n’interdit, au contraire, de porter de tels jugements, et c’est bien ce que Marx fait constamment, son discours en étant constellé. C’est seulement alors que la philosophie, et notamment la philosophie morale, retrouve son rôle. D’autre part il ne faut confondre la science avec les techniques qui en sont issues. Quand l’Ecole de Francfort dénonce « la culture industrielle » - autre nom de la consommation de masse – elle critique justement l’usage fait des techniques, lequel est inséparable, nous le verrons, des rapports de production dominants. On peut ajouter ceci : les champs de recherche sont aussi sélectionnés par la classe dominante (il suffit de voir combien aujourd’hui les recherches dites « marxistes » sont traitées ou exclues des institutions officielles).

Parmi les philosophes qui ont reconnu le statut scientifique du matérialisme historique on trouve, bien sûr, les grands dirigeants communistes, qui ont en même temps voulu le faire progresser (Lénine, Rosa Luxembourg, Gramsci, Mao…), et il m’arrivera d’y faire référence (s’agissant notamment de la théorie de l’impérialisme et de la lutte des classes), mais il faut dire qu’ils avaient bien d’autres chats à fouetter que le travail proprement théorique. Il y a eu aussi bien d’autres penseurs qui se sont rattachés au courant du matérialisme historique. Je dois dire que je n’ai pas trouvé grand-chose chez eux, s’agissant des concepts fondamentaux, car ils étaient surtout préoccupés par un contexte historique, qui était celui du fascisme et du stalinisme, lesquels représentaient un défi par rapport aux anticipations des pères fondateurs (je pense en particulier à l’école de Budapest). Je fais une exception pour l’école althussérienne en France, encore que j’estime que sa lecture du Capital, malgré ses apports indéniables, ait été une lecture sommaire.

D’une manière générale, je me méfie de la façon qu’ont les philosophes de s’approprier et de faire des synthèses de ce qu’ils estiment être l’essentiel du legs marxien. Que de lectures de survol, réductrices ou déformatrices ! Que de lectures attentives, mais biaisées par un apriori philosophiques [13] ! Et combien peu d’immersions dans les savoirs accumulés dans des champs spécifiques, ce qui contraste avec l’immense curiosité de Marx et d’Engels envers ceux de leur époque, alors que la tâche centrale de la philosophie est pour eux de ressaisir ce qu’ils peuvent apporter à la connaissance scientifique (c’est le sens de leur critique de l’économie politique[14]). En revanche je suis persuadé de l’importance de leur vigilance épistémologique : il n’y a aucune raison que la théorie marxiste échappe à l’idéologie dominante de son temps, depuis Marx jusqu’à aujourd’hui, et à sa propre idéologisation. Elle sera donc toujours à reprendre et à rectifier.

 

 

 



[1] De la société à l’histoire. Tome 1. Les concepts communs à toute société. 751 p.,, Tome 2 Les concepts transhistoriques, Les modes de production. 595 p., Editions Méridiens Klincksieck, Paris, 1989. Je désignerai par la suite ces ouvrages sous les sigles SàH 1 et SàH2.

[2] Les théories de la plus-value ont été présentées par Karl Kautsky, qui les a publiées entre 1905 et 1910 comme un 4° volume du Capital, mais il ne s’agit que d’un manuscrit antérieur au Livre 1, réunissant divers écrits des années 1862 et 1863.

[3] Je fais allusion à Jean-François Lyotard, en guerre contre les « métarécits » et les explications globalisantes de l’histoire, mais aussi aux déconstructeurs des « discours » de la modernité, toute cette French Theory qui est en vogue aujourd’hui, particulièrement aux Etats-Unis (Foucault, Derrida, Deleuze etc.). Leur point commun est que la science n’est qu’un discours et un « régime de vérité » comme un autre. Je les distingue soigneusement des théoriciens de l’Ecole de Francfort, qui, eux, dénoncent la pseudo-science et les perversions de la Raison pour sauver le meilleur de l’héritage des Lumières.

[4] J’ai beau chercher dans ma mémoire, je ne trouve (si ne mets de côté quelques philosophes qui se sont lancés dans une réinterprétation globale) que deux auteurs, du moins parmi ceux de langue française : Ernest Mandel, dont le Traité d’économie marxiste (Edtitons Christan Bourgeois, 1986) reste incontournable, et Robert Fossaert, La société, 8 volumes (aux Editions du Seuil), une somme d’une extraordinaire ambition et érudition (qui distingue, notamment, 15 modes de production), d’inspiration très structuraliste, qui n’était pas la mienne, mais qui été bien oubliée, alors qu’elle mérite absolument d’être revisitée. Beaucoup de travaux n’ont été que des analyses partielles portant sur un certain nombre de concepts. Il y a eu de nombreux travaux soviétiques et chinois, mais, étant non traduits, je ne les connais que fort peu. Je devrais faire une exception pour le marxisme analytique anglo-saxon, qui a proposé une révision d’ensemble de la théorie, mais, à mon avis, en s’en éloignant énormément (abandon de la théorie de la valeur, analyse des classes sociales avec d’autres critères etc.).

[5] La MEGA, dans la langue natale des auteurs, comporte 4 sections : les ouvrages et articles, Le Capiial (dans ses différentes éditions), la correspondance et les notes de lecture. Seule la deuxième section a été entièrement publiée, mais les sections 3 et 4 sont disponibles en numérique.

[6] Notamment dans les deux volumes de Le socialisme est (a)venir,  Editions Syllepse, Paris, 2001 et 2004.

[7] Dans les longs brouillons de sa réponse à Vera Zassoulitch, qui ne seront édités qu’en 1924 par Riazonov, l’un des marxistes les plus érudits.

[8] Cf le remarquable ouvrage qui porte ce titre, édité par Kolja Lindner et les Editions de l’Asymétrie, Toulouse, 2019. Il contient de substantiels extraits de ses manuscrits et des commentaires pertinents de nombreux contributeurs.

[9] Cf. Jared Diamond, Le troisième chimpanzé, Harper Collins, 1992, Editions Gallimard, 2000, pour l’édition en langue française.

[10] En cas de besoin, le lecteur trouvera dans les deux tomes de De la société à l’histoire(1989) la liste des auteurs que j’avais cités à l’époque.

[11] Althusser avait parlé d’une coupure épistémologique entre les textes « de jeunesse » et ceux dits « de la maturité » (L’idéologie allemande, Le Manifeste du Parti communiste). J’ai avancé l’idée d’une seconde coupure, qui s’opère tout au long des manuscrits qui préparent Le Capital, entre une problématique (un corps de concepts) d’orientation évolutionniste, et une problématique moins « économiste » et beaucoup plus dialectique, qui est à la base de ma relecture. Elle est exposée longuement dans l’Introduction générale de DàH.

[12] Pour les références et citations, j’avais utilisé l’édition du Capital et de ses trois Livres par les Editions sociales en 1971. Il y a eu d’autres éditions depuis, et d’autres traductions pour les livres 2 et 3, mais j’ai manqué de temps pour y renvoyer le lecteur. Je le prie de m’en excuser.

[13] Je pense en particulier à l’ouvrage extrêmement fouillé que Michel Henry a consacré à Marx (2 tomes aux Editions Gallimard, 1976), le tirant vers une phénoménologie de la subjectivité. Ce n’est pas le cas  du regretté Lucien Sève, qui a travaillé toute sa vie avec une rigueur exemplaire sur le corpus marxien, même si je ne suis pas toujours d’accord avec lui (sur la nature humaine, sur son rejet du socialisme). Je me suis senti proche également des travaux exigeants de Yvon Quiniou et de Denis Collin.

[14] Réfléchir sur elles, c’est notamment prendre ses distances avec ce qu’Althusser appelle « la philosophie spontanée de savants ».

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